Les différents Prix du Livre Pyrénéen 2020 ont été attribués et notamment à Pierre Birnbaum né à Lourdes en juillet 1940

Prix du Livre Pyrénéen-Connaissance 2020 :

Il met en valeur un ouvrage constituant un apport conséquent pour la valorisation ou la connaissance des mondes pyrénéens ou d’un de leurs aspects.

Il a été attribué à

La leçon de Vichy

Une histoire personnelle

de Pierre Birnbaum

2019, Le Seuil, 242 p.

Pierre Birnbaum est né à Lourdes en juillet 1940. Rien ne destinait ce fils de juifs d’origine polonaise à naître et à passer les années de sa prime jeunesse au fin fond des Pyrénées centrales, un territoire relativement éloigné des grands axes de circulation, loin de la guerre aussi, que la France vient de perdre face à l’Allemagne nazi. Et c’est justement le nouvel Etat français, mis en place par cette dernière, à l’origine de la persécution et de la traque des Israélites, qui amène les parents de l’auteur à se cacher en Bigorre et à confier leurs enfants à une famille de paysans d’Omex en vallée de Batsurguère. 

L’ouvrage met notamment en lumière, à travers le destin de Pierre Birnbaum, de sa sœur Yvonne et de sa famille, le rôle des personnes, dans les Hautes-Pyrénées comme ailleurs, lors de cette guerre, leurs attitudes vis-à-vis des ignobles dispositions prises par le Régime de Vichy à l’encontre des populations juives, françaises ou non. Leur humanité ou leur monstruosité.

L’auteur deviendra par la suite le grand historien de l’État français et de ses grands fonctionnaires de la IIIe République, parcours sur lequel il revient tout en analysant ses propres motivations. Ainsi, la petite histoire et la grande histoire se trouvent inextricablement mêlées pour donner un ouvrage fort, clair et sensible, où se dévoilent les lâchetés et cruautés de l’État de Vichy, celles de ses fonctionnaires et de ses thuriféraires, mais aussi les simples actes d’humanité et de bon sens d’humbles paysans pyrénéens dont l’acte de résistance le plus élémentaire et le plus précieux fut de cacher et d’élever deux jeunes enfants traqués du simple fait de leurs origines.

Prix du Livre Pyrénéen-Littérature 2020 :

Il distingue un ouvrage littéraire (fictions, récit…) ayant pour sujet ou cadre les Pyrénées.

Il a été attribué à

Bergère des collines

de FLORENCE ROBERT

2020, Corti, 200 p.

Une calligraphe installée dans le Gers décide un jour de « donner en [m]oi une place à la nature ». Elle s’en va suivre une formation agricole pour devenir éleveuse de brebis et bergère. Elle s’installe ensuite dans les Corbières avec d’abord une centaine de bêtes. Et c’est cette vie nouvelle qu’elle raconte dans un récit remarquable de vérité, de poésie, de richesse d’observation, de mise à nu d’une expérience nouvelle destinée à durer, aventure où la méditation se brise sur des interrogations brutes, où la vie joue avec la mort, où la quiétude du grand dehors se heurte au stress des agnelages, aux chiens facétieux, aux brebis capricieuses.

L’écriture de Florence Robert combine une concise objectivité à une sensibilité intense. Lisant ce livre dense, poétique au meilleur sens du mot, c’est-à-dire le moins fade, le plus perçant, on mesure ce qu’est être vertueux avec le milieu, les contradictions entre les idéaux et la matérialité de la vie, l’émerveillement devant l’harmonie d’une nature où l’homme, en l’occurrence la femme, se comporte en complice d’abord naïve puis avertie, mais aussi la douleur, la tristesse voire la désolation dans certaines situations. Dans ces pages, nul angélisme, nul idéalisme, mais de la passion, une intense sensorialité, de l’angoisse et de l’apaisement, de la lumière et de la fatigue, du réel plein les yeux et des doutes pour les nuits. La garrigue et les villageois, les travaux et les jours, les saisons et les prédateurs, l’exaltation des sens et la circularité du temps forment la trame d’un ouvrage vibrant.

Cette passionnante, sobre mais ardente chronique couvre les deux premières années de la vie de bergère de l’auteure, puis reprend dix ans plus tard, quand, éleveuse, elle engage et forme à son tour bergers et bergères, peut-être pacifiée, toujours lucide, pugnace et généreuse.

Prix du Livre Pyrénéen-Guide 2020 :

Il récompense un ouvrage permettant de découvrir en pratique les réalités pyrénéennes, dans quelque domaine que ce soit, du topo guide au livre de cuisine en passant par les atlas, les inventaires…

Il a été attribué à

Tous dehors ! à la montagne

de Patrick et Manon Luneau

2019, La Salamandre, 144p.

Les auteurs, père et fille, engagés dans la protection de l’environnement et de nombreuses rencontres nature avec des enfants proposent dans la collection « Tous dehors » aux éditions de la Salamandre un choix varié et original d’activités familiales.

Organisé en 7 chapitres (explorer, savourer, inventer, se bidonner, se poser, aider la nature, tous dedans), l’ouvrage s’ouvre sur un sommaire et une liste du matériel nécessaire (simple, à la portée de tous). Il est complété par une bibliographie simplifiée mais pratique et un classement des 60 activités par âge, puis par saison.

Des photos vivantes et précises, une mise en page aérée et facile d’accès, un bel ouvrage soigné et résistant aux manipulations incitent à tenter l’expérience : découvrir ou redécouvrir, mieux connaître et aimer la nature en famille à travers des initiatives sympathiques et respectueuses des milieux naturels et de leurs habitants. Contemplation, créativité sont aussi au rendez-vous, rêver avec les nuages, photographier le froid, « encadrer » la montagne… et les Pyrénées en particulier, qui servent largement de fond photographique.

Prix du Livre Pyrénéen – Binaros 2020

Il met en valeur un ouvrage original traitant des Pyrénées, à la marge des genres déjà définis. Il permet de récompenser les livres de jeunesse, de photos ou d’art, des livres atypiques.

Il a été attribué à

Carnet de bergères

Marion Poinssot et Violaine Steinmann

Le Pas d’oiseau, 2019, 112 p.

Elles sont bergères en Ariège et l’ont été également dans les Alpes. Toutes deux écrivent et dessinent. Toutes deux dépoussièrent l’approche de leur métier avec jubilation, lucidité, sensualité, tendresse ici, sévérité là. Leur écriture vire du miel au vinaigre quand il leur chaut, de l’attachement à la colère, de la rosée au feu quand se tordent les humeurs, quand gronde ou ronronne le tempérament. Elles ont de l’expérience et connaissent leur boulot, elles ont du caractère et savent ne pas s’en laisser conter. Elles ont du talent et nous réjouissent par un enchaînement de textes ramassés, vifs, même si parfois pointe la mélancolie, le tout semé d’illustrations fraîches piquetées d’humour. 
Ce livre fait partie de ceux qui surprennent, que l’on ignore attendre pour s’en emparer et s’en enchanter. Il est un témoignage ardent de la vie en estive dans une époque difficile pour ce type d’élevage et n’hésite pas, au-delà de sa valeur pédagogique, à parler haut et fort, cru et dru, et d’où les aspects sociétaux, environnementaux et politiques ne sont pas remisés sous le châlit du bout de la houlette. Dans ces pages on rencontre des voix libres, réalistes, ardentes, donnant un coup de vieux aux propos folklorisants sur le métier de pâtre. Métier rustique qui se modernise et se féminise, métier exigeant, fatigant, à la fois discipliné et insoumis. Les auteures ne renoncent pas à nous parler de leur intimité, de leur désir, de leur possible accablement, de la cocasserie de certaines situations d’un quotidien qui ne verse pas tous les jours dans la poésie mais sait rappeler son fond trivial. 
On est plongé dans une délectation de lecture, un ravissement de rencontre. On s’emplit d’une félicité rare parce que ce face-à-face est traversé de sincérité et d’esprit, d’humeur et de pragmatisme.