Ce mercredi 8 juin 2022 à 11h, au square de la Médaille Militaire, a eu lieu une Cérémonie en hommage «aux Morts pour la France» en Indochine.
La cérémonie était présidée par Fabien TULEU, nouveau Sous-préfet d’Argelès-Gazost, en présence des Conseillères départementales du Canton de Lourdes 1 Evelyne LABORDE et du Canton de Lourdes 2 Marie PLANE, du Maires Thierry LAVIT, du Conseiller municipal aux Anciens combattants Jean-Georges CRABARIE, de plusieurs élus municipaux de la Majorité et de l’Opposition, des Président(e)s des Associations patriotiques et de leurs porte-drapeaux.
Parmi les Anciens combattants présents, se trouvait le général Pierre LATANNE (venu avec sa famille), qui a participé à la terrible bataille de Diên Biên Phu au Vietnam, avec le grade de sous-lieutenant, bataille la plus longue, la plus furieuse, la plus meurtrière de cette guerre.
La cérémonie a commencé par la diffusion de la chanson « Diên Biên Phu », ensuite le Colonel Lavigne Président du Cercle Patriotique Lourdais a lu un texte explicatif sur la Guerre d’Indochine qu’il a qualifié de Guerre « du soldat oublié » (lire ce texte ci-dessous), puis a suivi la lecture d’un poème d’André CLIN intitulé « Mourir pour l’Indochine » par Fabienne MERIC (femme d’Ancien combattant), une lecture remarquable, une interprétation qui a ému au plus au point toute l’assistance. (lire ce texte ci-desous). Pour finir le Sous-préfet a lu le Message du Ministre des Armées Sébastien LECORNU.(lire ce texte ci-dessous).
Puis ont suivi 4 dépôts de gerbes : une par Mesdames les Présidente et Vice-présidente du Souvenir Français Madeleine NAVARRO et Claudie TOURREILLE, une par un Ancien combattant d’Indochine Jacki SAMOUILLAN et l’ancien Président des Médaillés militaires de Lourdes Louis BALOUP, une par le Maire et le Conseiller municipal aux Anciens combattants, une par le Sous-préfet.
Ensuite a retenti la Sonnerie aux morts suivie de la Minute de silence et de l’Hymne national chanté avec ferveur par toute l’assistance.
Por finir les Autorités ont salué les Présidents des Associtions patriotiques et leurs Porte-drapeaux.
Discours du Colonel Daniel LAVIGNE :
« La cérémonie d’aujourd’hui est dédiée aux morts de la guerre d’Indochine et aux soldats du Corps Expéditionnaire Français en Extrême Orient. Cette commémoration ne sera instituée qu’en 2005 soit 50 ans après la fin des combats. Face à vous, une urne contenant de la terre du point d’appui « Eliane » à Diem Bien Phu, est dédiée aux anciens d’Indochine.
Mai 1945. La France termine une guerre sur le théâtre européen, poursuit la guerre en Extrême Orient contre le Japon puis en 1946 entre dans un conflit armé contre les troupes communistes et indépendantistes du Viet Minh, conflit qui en 1949, sera justifié par le pouvoir politique comme étant la participation française à « la défense de l’Occident sur le Rhin et le Mékong ». Avec l’argent et le matériel américains et, le sang des hommes de l’Union française, la France entre dans la « guerre froide » en Cochinchine, en Annam, au Tonkin. Ces noms résonnent encore pour tous ceux qui, dans les années cinquante, écoutaient à la TSF les messages trop brefs et lacunaires sur les affrontements meurtriers d’Indochine.
La guerre d’Indochine est la guerre «du soldat oublié» qui enfantera le « soldat perdu » des combats d’Afrique du Nord a écrit George Armstrong Kelly, attaché de recherches à Harvard. Elle est un combat tragique de l’Armée française reconstruite à partir des Forces Françaises de l’Intérieur, des Forces Françaises Libres, des troupes coloniales et des vietnamiens. Elle dure de 1945 à 1954. Le Corps Expéditionnaire Français, seul, « loin de chez nous », mal accompagné, trop souvent insulté, utilisant parfois des munitions sabotées dans les arsenaux français, s’est embourbé dans un combat sans espoir, combat mené par des hommes héroïques qui refusent parce qu’ils sont frères d’arme d’un groupe, d’une section, d’une compagnie, d’un bataillon, de perdre leur âme et leur honneur.
«Oubliés» des français, les combattants du Corps Expéditionnaire, soudés par les traditions de fraternité de leurs unités, unis dans la rage et la peur face à la mort, toujours fidèles au drapeau tricolore, seront de toutes les bagarres de Hanoï, Dong Khé, Cao Bang, Lang son sur la RC4, Vinh Yên, Mao Khé, Ngia Lo, Hôa Binh, Na San, Muong Khoua, Diên Biên Phu, col de Mang Yang mais aussi dans les bagarres non connues des postes isolés qui submergés par le nombre, lancent à la radio, leur dernier message avant de saboter le poste et mourir. Tous, de façon anonyme, ont engagé leur vie pour l’honneur de la France.
Soldats «perdus» entre le sens du devoir et le doute sur l’utilité de leur sacrifice, ignorés par la métropole, ils ont choisi, avec une terrible abnégation, de verser leur sang et leurs larmes sur une terre étrangère qu’ils ont aimée.
Le sous-lieutenant Pierre Latanne, dernier survivant du 5° Baouanne, aujourd’hui général, est toujours debout parmi nous pour saluer ses frères d’armes et entretenir le souvenir de leur sacrifice. Il est accompagné par Jacki Samouillan, porte-drapeau des anciens d’Indochine et ancien combattant de la 73° compagnie coloniale à Hué et de Victor Merx, ancien gendarme de la garde vietnamienne.
Les pertes au combat de l’Union française s’élèvent à 60 000 morts, 70 000 blessés et 10 000 disparus. Les pertes des troupes vietnamiennes fidèles à la France seront de 419 000 morts, disparus, blessés, prisonniers. Dans les camps «de rééducation» sur 22 000 prisonniers, 50% ne reviendront pas.
Malgré la faim, la maladie et les sévices, nos soldats, solidaires sans trahir leurs convictions, au péril de leur vie, souvent avec «cran et ironie», feront face à leurs bourreaux les commissaires politiques vietminh mais aussi les commissaires politiques français qui ne seront jamais condamnés pour leur collaboration active avec l’ennemi.
Mon Dieu, maintenez aux survivants toujours debout «ce qui leur reste, la force pour garder la foi» dans les valeurs de notre pays. «Ce que les autres ne veulent pas» ils l’ont vécu dans l’enfer des batailles.
Mon Dieu, faites que les jeunes français gardent le souvenir du sacrifice de leurs aînés, engagés «loin de chez nous» au service de leur patrie. Qu’ils perpétuent le courage, l’audace, la vaillance le sens du devoir rempli avec honneur et fidélité.
«L’histoire brûle les hommes, après il faut recueillir les cendres et raconter» (Hélie Denoix de Saint Marc). Notre devoir aujourd’hui, est de rétablir la vérité sur une guerre ignorée par les jeunes générations et les programmes scolaires. Que les soldats «perdus» de la guerre «oubliée» de notre histoire retrouvent enfin la Reconnaissance de la France et la Paix.
Les «oubliés» écoutent toujours «je ne regrette rien» d’Edith Piaf. »
Poème : « Mourir pour l’Indochine » lu par Fabienne MERIC
» Tu étais mon ami ! Ensemble, nous sommes partis !
Parcourant les mers, voguant vers l’Indochine
Pataugeant dans les rizières, la jungle de Cochinchine
Pour défendre là-bas la France et son Empire
Sur les bancs de l’école, j’avais entendu dire
Prestige d’un peuple, l’orgueil d’une nation.
Dans la fournaise, on bradait des garçons.
Tu étais mon ami! Comme moi, t’as pas compris !
On recherchait l’ennemi qui se nommait viêt-minh,
Patrouillant nuit et jour dans les rues de Gia Dinh.
Tu regardais, c’est sûr, ces belles et jolies filles,
Ce mystérieux pays où tant de jonques fourmillent.
Nous étions tous unis, aucun ne montrait son grade.
Car tous redoutaient ces terribles embuscades.
Tu étais mon ami
Soudain, j’entends un cri.
Voyant son corps sans vie et ses grands yeux meurtris
Affalé sur le sol, j’ai tout de suite compris
Que plus jamais il ne verrait d’aurore.
Je n’osais y croire mais j’espérais encore.
Dans le fracas des armes,
J’ai versé quelques larmes.
Il était mon ami et la guerre me l’a pris.
En ce lointain pays, loin des lieux de ton enfance.
A jamais tu reposes, loin de la terre de France
A l’orée des hévéas, vous verrez une croix,
Simple distinction qui nous rappelle sa foi.
On peut y lire ceci : son nom en lettres majuscules,
Sa date de décès et son numéro matricule,
» Mort pour la France «
Tu étais mon ami.
Pour sa patrie, il a donné sa vie.
André CLIN
Message de Sébastien LECORNU, ministre des Armées, pour la Journée nationale d’hommage aux Morts pour la France en Indochine lu par le Sous-préfet Fabien TULEU
« De 1940 à 1954, ce sont près de 500 000 militaires, membres du corps expéditionnaire français en Extrême-Orient, légionnaires, tirailleurs africains et nord africains, réguliers et supplétifs vietnamiens, cambodgiens et laotiens qui ont porté nos couleurs, sans relâche, à l’autre bout du monde.
Qu’il soit rendu hommage à ces combattants, qui, dans une guerre devenue mondiale, ont maintenu la présence française face aux assauts de plus en plus menaçants de l’occupant japonais ; Aux 2 650 d’entre eux qui périrent le 9 mars 1945, dans le dernier coup de force d’un occupant devenu sans merci ; Aux 3 000 prisonniers qui subirent l’internement et parfois la torture.
Qu’il soit rendu hommage à ceux qui poursuivirent la lutte, afin d’y maintenir l’autorité de la France, ou de défendre leur indépendance à ses côtés.
Que leur combat dans les conditions les plus extrêmes ne soit jamais oublié, ces soldats des trois armes, ces membres du service de santé, que toujours il soit dit l’absolu de leur courage, et la grandeur de leur sacrifice.
Qu’il soit rendu hommage aussi, aux milliers de prisonniers, et que jamais ne s’efface le souvenir de ceux emportés par la maladie, la famine ou la fatigue d’une effroyable captivité.
Qu’il soit rendu hommage enfin, aux civils qu’un rapatriement forcé arracha à leur foyer, à leur histoire, et leur culture, pour gagner une métropole qu’ils ne connaissaient pas, et qui pourtant leur tendit les bras.
Ces combattants ont pris place dans notre histoire aux côtés des plus braves, leur mémoire nous oblige, leur courage inspire, leur abnégation nous lie.
Qu’en ce 8 juin enfin, partout en France il soit dit : Honneur aux combattants d’Indochine !
Vive la République !
Vive la France ! »