Une unité mobile d’intervention, mais aussi des logements pour éloigner les auteurs de violence ou encore un meilleur partage d’information des différentes juridictions des tribunaux… Ce mardi après-midi 26 novembre, les nombreux partenaires de la lutte contre les violences faites aux femmes ont présenté leur plan d’actions 2024-2027 en matière de violences conjugales, sous l’égide de la Préfecture.
Isabelle COSTES, Déléguée aux droits des femmes, a présenté un plan dense, faisant intervenir aussi bien le milieu associatif dédié, que les partenaires institutionnels comme le Département ou l’Education nationale, mais aussi les bailleurs sociaux ou l’ordre des médecins. Le fruit d’un travail initié en 2021 et impliquant tous ces acteurs.
Mesure phare de ce plan, ou plutôt nouveauté, une unité mobile d’intervention de soutien psychologique pour aller au plus près des femmes, mais aussi des hommes victimes, qui représentent 10% des victimes. Cette dernière fera intervenir des professionnels de santé en binôme, en lien avec la clinique de Piétat. Psychologue et assistant social, éducateur spécialisé et psychologue ou infirmier devraient être à même d’intervenir là où les ressources sont pour l’instant limitées ou inexistantes, au plus près des situations.
L’unité devrait être opérationnelle trois jours par semaine au premier trimestre 2025, au plus tôt en janvier. Elle pourra ainsi offrir un lieu neutre où recueillir la parole de la personne victime, voire à son domicile si l’auteur en a été éloigné. Elle permettra de mettre en place un accompagnement le temps que le relais soit pris par les associations.
Un éloignement de certaines structures auquel travaille l’ensemble des acteurs, qui aimerait voir une unité médico-judiciaire installée dans le département, la plus proche étant celle de Toulouse, empêchant certaines femmes de faire constater leurs blessures pour pouvoir déposer plainte. Grâce à la CPAM, la MSA et le SIAO, le transport jusqu’à cette UMJ est néanmoins assuré et financé.
Une Maison des femmes est aussi en réflexion, et s’articulera avec le dispositif pilote de l’unité mobile.
C’est bien une prise en charge globale, sur la durée que portent ces acteurs. Cette dernière, d‘ailleurs, ne fait que s’allonger face à des situations de plus en plus complexes. Six ou sept allers-retours en moyenne avant de définitivement quitter le domicile conjugal, mais aussi exposition des enfants aux violences ou encore violences économiques et administratives mais aussi absence d’emploi donnent à la sortie de ces parcours marqués par la violence un air de parcours du combattant.
L’accompagnement fourni doit donc recouvrir tous ces aspects. Aide économique de la CAF (95 dossiers en 2023 pour un montant moyen de 872,34€), parcours d’insertion avec le CIDFF, logement d’urgence et baux glissants avec les bailleurs sociaux et notamment Promologis, extension du parc à disposition à Luz, Argelès-Gazost, Bagnères-de-Bigorre et Trie-sur-Baïse, mais aussi aide juridique et arsenal juridique pour être apte à retirer l’autorité parentale si nécessaire… Le monde associatif marche main dans la main avec les différents organes de l’Etat.
Côté judiciaire, la procureure de la République Bérengère PRUD’HOMME le reconnaît : «La justice souffrait d’un grand cloisonnement dans ses services». Résultat, les procédures pénales n’étaient pas connues des juges aux affaires familiales et vice-versa. Grâce à une chargée de mission dédiée, le partage d’information est désormais d’actualité.
C’est aussi tout le volet prévention qui a été évoqué. Repérage et sensibilisation des jeunes et des enfants au sein de l’Education nationale, mais aussi mise en place d’interlocuteurs ressources dans les entreprises, formation de ceux qui accompagnent les personnes victimes… La Préfecture et ses partenaires oeuvrent à la mise en place d’un écosytème favorable à la libération de la parole. Un «échec», résume le Préfet Jean SALOMON, quand après un féminicide, on lit dans les journaux que tout le voisinage savait…
Les structures s’intéressent aussi à l’accompagnement des auteurs de violence, assuré par France Victimes et son centre de prise en charge des auteurs de violences conjugales. «Pourquoi est-ce toujours la victime qui doit s’éloigner ?», interroge le Préfet. Un dispositif existe donc en CHU pour héberger d’urgence les auteurs. Mais loin d’être parfait, la présidente de France Victimes, Madame PIOUX, lorgne vers des dispositifs plus pérennes de départements voisins.
Un dispositif décliné au total en 50 actions, pour répondre à une hausse faramineuse des victimes : +120,75% depuis 2019. Cinq personnes sont décédées de ces violences depuis 2020.
En 2023, 497 faits ont été enregistrés, à parts égales entre les zones police et gendarmerie, laissant penser à une forte exposition en milieu rural. Sur 395 dossiers arrivant au tribunal, 124 jugements ont été rendus pour une proportion d’environ 25% de prison ferme.
Les moyens judiciaires se déploient également pour éviter toute récidive : 57 téléphones « grave danger » sont à disposition et trois bracelets anti-rapprochement, dont un est actif.
Ce plan envoie donc un «vrai message d’espoir» avec une mobilisation de tous, espère le Préfet.
Gaetane ROHR Journaliste