Lourdes : très belle et très émouvante Cérémonie de la Journée nationale d’hommage aux morts pour la France pendant la guerre d’Algérie

Ce Dimanche 5 décembre à 17h, au square de la Médaille Militaire, a eu lieu la très belle et très émouvante Cérémonie de la Journée nationale d’hommage aux morts pour la France pendant la guerre d’Algérie et les combats du Maroc et Tunisie, et sous une pluie glaciale chacun était à son poste pour cet hommage.

Cette cérémonie a été placée sous l’autorité du Colonel Antoine DE LABRETOIGNE DU MAZEL, Délégué militaire départemental des Hautes-Pyrénées, commandant d’Armes de la place de Tarbes et chef de corps du 1er Régiment de Hussards Parachutistes.

A noter la présence de 2 gendarmes adhérents du Souvenir français présents en uniforme de soldats d’époque de la guerre en Algérie.

Elle a été présidée par Le Sous-préfet Didier CARPONCIN en présence du Maire Thierry LAVIT, du Conseiller municipal délégué aux Anciens combattants Jean-Georges CRABARIE, de quelques élus de la Majorité et de l’Opposition, du Directeur de l’ONAC Bruno MONTAGNOL, d’un Représentant de la Gendarmerie, des Présidents des Associations patriotiques, des Porte-drapeaux, du Piquet d’honneur du 1er Régiment de Hussards Parachutistes de Tarbes.

Après l’accueil des Autorités par le Piquet d’honneur, le Colonel Daniel LAVIGNE a prononcé un remarquable discours à la fois historique, mémoriel et explicatif (voir ci-dessous). A égrené ensuite les noms des jeunes appelés Lourdais morts pour la France en Algérie. A eu une pensée pour les camardes adhérents au comité local de l’UNC décédés depuis 2020. A eu une pensée pour Elisée PICCIOCHI (ancien Président départemental des Médaillés Militaires) décédé il y a 48 heures de la covid. « La terre des Aurès » que nous allons déposer était la sienne ».

Puis le Sous-Préfet Didier CARPONCIN a fait lecture du message de la Ministre déléguée auprès de la ministre des Armées Geneviève Darrieussecq. (voir ci-dessous)

On a pu entendre ensuite la voix de Gaby NIVELLE (Ancien combattant en Algérie et ancien Président du Comité local de l’UNC décédé en 2016) qui chantait un couplet du très beau chant « Algérie, Pays du soleil » écrit et créé pour le Pèlerinage des Anciens combattants qui se déroule tous les 2 ans à Lourdes, composé par l’abbé Guy Herbreteau, prêtre de Vendée, sur l ‘air de « Fais du feu dans la cheminée, je reviens chez nous », en présence de sa veuve Annie NIVELLE étreinte par l’émotion. Puis les autres couplets ont été chantés par le chanteur Basque David Olaïzola.

Un deuxième chant de Jean-Pax Méfret parlant de la nostalgie du temps où l’Algérie était française « Djebel d’Amour » est venu complété.

Puis a été déposée une urne contenant de la terre des Aurès par Madame Monique LADJINI (veuve de harki), Marcel SIMACOURBE et Pierre ITHURBURU anciens combattants, recouverte par une plaque commémorative par un sous-officier et un militaire du rang du 35ème RAP de Tarbes.

Dépôt de la terre des Aurès en Algérie par Madame Monique LADJINI (veuve de harki), Marcel SIMACOURBE et Pierre ITHURBURU anciens combattants

Ensuite Louis CAZALAS Président du Comité de Lourdes du Souvenir Français et Madeleine NAVARRO Vice-présidente ont déposé une gerbe. C’était sans doute la dernière gerbe officielle déposée Louis CAZALAS, très ému, puisqu’il quitte la présidence en février.

Louis CAZALAS déposant une de ces dernières gerbes officielles après 47 ans d’engagement exemplaire au Souvenir Français

Gérard ALBERT et Gabriel SARTOU ont à leur tour déposé une gerbe pour l’Union Nationale des Combattants.

Suivie du dépôt de gerbes des Autorités celle du Maire accompagné du Délégué aux Anciens Combattants, puis celle du Sous-préfet.

Puis la sonnerie aux Morts a retenti, suivi de la Minute de silence et de l’Hymne national chanté avec ferveur par tous les présents.

Est venue ensuite la Remise de 3 Médailles de la Défense Nationale échelon bronze avec agrafe Sahara et Essais nucléaires par le Colonel Antoine DE LABRETOIGNE DU MAZEL à Georges THEAS, Robert MERIC, Jacques SEYRES.

Décorés de la Médaille de bronze de la Défense Nationale avec agrafes Sahara et Essais nucléaires : Georges THEAS, Robert MERIC, Jacques SEYRES

Pour finir les Autorités civiles et militaires ont salué le Piquet d’Honneur, sont allés féliciter les Décorés, remercier les Porte-drapeaux et saluer les Présidents des Associations patriotiques.

Une très belle et très émouvante cérémonie !

Discours d’introduction à la Cérémonie du Colonel Daniel Lavigne, Président du Comité local de l’UNC
« Monsieur le Sous-Préfet, monsieur le Maire, mesdames et messieurs les élus, frères d’arme, mesdames et messieurs les présidents des associations patriotiques, mesdames et messieurs, bonjour.
Aujourd’hui nous célébrons le 59ème anniversaire de la fin des Opérations de maintien de l’ordre en Algérie. Cette guerre, qui ne disait pas son nom, a débuté officiellement, le 1er novembre 1954, jour dit de la «toussaint rouge». La veille, dans un manifeste, le Front de Libération Nationale (FLN) annonçait «la lutte par tous les moyens». Ce 1er novembre, 70 attentats seront commis sur le territoire algérien.
En particulier, dans les gorges de Tighanimine, dans les Aurès, un autocar est stoppé : le Caïd Hadj Sadock, lieutenant de réserve de l’armée française, est tué par une rafale qui atteint en même temps les époux Guy et Jeanine Monnerot, 23 et 21 ans, instituteurs, volontaires par idéal humanitaire pour enseigner en Algérie ; à Batna deux sentinelles sont abattues ; à Kenchela deux militaires sont tués ; en Grande Kabylie, un garde champêtre musulman est assassiné et en Oranie un fermier européen.
Le 12 novembre, devant l’Assemblée Nationale le ministre de l’intérieur, François Mitterrand, exprime son refus de négocier avec les rebelles : «l’Algérie c’est la France». Le Président du Conseil, Pierre Mendès France, confirme : «ici c’est la France». La terreur, choix stratégique du FLN, s’oppose alors, dans un conflit asymétrique, au maintien de l’ordre instauré par l’Etat français. La première cible du FLN est le musulman profrançais où travaillant avec les administrations officielles. La deuxième cible est l’européen représentant l’Etat français puis très vite tous les civils européens.
En parallèle au terrorisme, le conflit armé va opposer dans des combats de très haute intensité, les katibas, groupes rebelles armés installés dans le bled, aux forces militaires françaises. Nos armées se voient chargées peu à peu de la contre-insurrection, de la pacification et de l’intégration des populations autochtones. Maintien de l’ordre avec utilisation de la force armée, guerre civile, guerre de libération, est le vocabulaire utilisé pour nommer ce conflit qui sera enfin reconnu «guerre d’Algérie» en 1999.
Pour le soldat, les actions de pacification se heurtent à la violence des combats à laquelle s’ajoute l’horreur des massacres civils, la profanation des cadavres, les viols. A massacre aveugle, répression aveugle. Le soldat doute et veut un engagement clair de son pays. Les militaires engagés en Algérie, issus pour les plus anciens des FFI et FFL sont les rescapés « Soldats oubliés » d’Indochine qui deviendront, avec les jeunes du contingent, des soldats «perdus». Le commandant Hélie de Saint Marc, le soir de son procès, a résumé le sentiment du «soldat perdu» : « Monsieur le Président, on peut demander beaucoup à un soldat, en particulier de mourir, c’est son métier. On ne peut lui demander de tricher, de se dédire, de se contredire, de mentir, de se renier, de se parjurer».

Le général de Gaulle, premier Président de la V° République, mettra fin en 1962, à l’indécision politique, au chaos du déchaînement des passions humaines et à la fin logique d’une gestion stratégique incontrôlée de l’ensemble du conflit. Le doute sur l’utilité des combats, l’abandon «non dit» de l’Algérie, la «non observation unilatérale des accords d’Evian par le FLN» entraineront une fin de conflit sanglante, marquée par «le fossé de sang entre deux communautés» a écrit Benjamin Stora, fossé qui conduira à l’exode des européens et au massacre d’Oran du 5 juillet 1962, deux jours après la proclamation de l’indépendance de l’Algérie.
Au cours de ce conflit, 28500 militaires français seront «tués à l’ennemi» et 65 000 blessés. 60 000 à 80 000 harkis et moghaznis et 1077 militaires métropolitains, seront tués où assassinés après le Cessez le feu unilatéral français entre 1962 et 1964.
La terre des Aurès, haut lieu de combats féroces, terre du sang versé, souvenir d’une jeunesse meurtrie dans une guerre incomprise nous rappelle que là-bas «loin de chez nous» des hommes et des femmes sont morts au service de la France, leur pays. Cette terre, aride, de couleur jaune-fauve mêlée au rouge-sang des combattants de toutes les communautés est le sacrifice de nos soldats. Elle symbolise, la souffrance, la blessure, la soif, l’âpreté des combats, mais aussi le lien qui permet d’espérer un avenir moins douloureux. Cette terre, qui va être déposée par la veuve d’un harki, encadrée par deux anciens d’Algérie, rappelle aux jeunes générations, que leurs aînés ont répondu à l’appel de leur pays et rempli leur devoir : Sur les quais d’embarquement, sous le regard de Notre Dame de la Garde, une larme sur leur visage, une prière religieuse ou républicaine aux lèvres, dans les mains un fusil, ils sont partis, sacrifiant leur jeunesse pour servir leur patrie. Ceux qui sont revenus, soldats aux nuits tourmentées, au regard perdu, taisent encore à leur famille et aux amis les horreurs vécues et se confient dans leurs associations aux frères d’arme, seules personnes aptes à comprendre leurs angoisses et leur désarroi. Cette terre du sacrifice doit nous rassembler et nous permettre d’être «toujours unis comme au front».
Anciens d’Algérie et habitants de Lourdes rappelez vous de : Cazenave Jean, Dulac Michel, Fagois Jacques, Lesponne Louis, Pouzaud Auguste, Saint Blancat Claude, Sopena Joseph, nos frères d’arme «Morts pour la France» en terre algérienne. Ils avaient 20 ans.
Souvenons nous aussi de nos 4 camarades qui nous ont quittés depuis l’année 2020 : Louis Prat, Georges Vignes Faure, Michel Fontaine, Michel Abaziou. Nous aurons une pensée pour monsieur Elisée Picciochi décédé il y a 48 heures de la covid. La terre des Aurés était la sienne.
Actuellement les soldats de notre pays sont engagés dans des «opérations extérieures». Dans ces opérations, la Mort et la blessure sont présentes. La France se bat «dans et hors les murs» pour casser et détruire les sources du terrorisme. Que nos soldats d’aujourd’hui ne subissent pas avec le temps la double peine : «soldat oublié et soldat perdu».

Lecture du Message de Madame Geneviève Darrieussecq Ministre déléguée auprès de la Ministre des Armées par le Sous-préfet.
« En ce 5 décembre, nous faisons de cette journée nationale le rendez-vous de la fidélité. Fidélité dans l’hommage solennel rendu à toutes les femmes et à tous les hommes, civils ou militaires, qui sont «morts pour la France» de 1954 à 1962. Fidélité dans la reconnaissance pour toutes celles et tous ceux qui ont porté les armes de la France. Fidélité dans le souvenir des victimes des tragédies de la Guerre d’Algérie ou des combats au Maroc et en Tunisie. Fidélité par l’action de l’Etat et la reconnaissance à destination des rapatriés.
Des soldats de métier, des centaines de milliers de jeunes hommes appelés ou rappelés sous les drapeaux, des milliers de membres des forces supplétives ont servi et combattu. Près de 30 000 périrent souvent très loin de leurs attaches et de leurs familles, souvent à l’âge ou l’on construit sa vie. Cette journée leur est consacrée.
Toute une génération a affronté la guerre et ses multiples visages, la violence et son âpreté. Nombreux sont ceux qui en souffrent encore dans leur chair, dans leur corps et dans leur esprit. Nombreux sont ceux pour qui le souvenir de ces mois de service et de guerre est toujours tenace. Les anciens d’Afrique du Nord sont les forces vives du monde combattant et saluent aujourd’hui leurs frères d’armes «morts pour la France». La Nation les accompagne dans leur hommage et pense aussi aux disparus civils et militaires.
La France sait la douleur des anciens harkis qui ont été contraints de quitter leur terre natale et ont été indignement accueillis en métropole. Nous œuvrons pour la reconnaissance et la réparation.
Collectivement, nous voyons, nous ressentons encore les blessures non-cicatrisées nées de cette épreuve nationale, nées de la complexité et des multiples facettes de la Guerre d’Algérie. Nous n’oublions ni les souffrances des civils, ni les familles qui ont abandonné un pays qu’elles aimaient tant. Autant de drames familiaux, personnels et même intimes, notamment pour les rapatriés d’Algérie.
Ils sont le million de Français d’Algérie d’origine européenne, ce peuple mosaïque fait d’artisans, de commerçants, d’agriculteurs, d’enseignants, de militaires, de fonctionnaires et d’entrepreneurs, souvent de conditions modestes. Ils ont été arrachés à leurs racines après le 19 mars 1962. Certains ont été tués par des balles françaises le 26 mars rue d’Isly, d’autres ont été massacrés à Oran le 5 juillet 1962. Nombre d’entre eux ont été accueillis dans des conditions très précaires, rejetés ou stigmatisés, connaissant parfois le désarroi psychologique ou la misère sociale. Ces vérités doivent être énoncées, simplement, clairement. Sans les polémiques, les préjugés ou les non-dits qui enkystent les consciences et participent à l’affrontement des mémoires.
Ensemble, nous contribuons à transmettre, à expliquer ce passé douloureux, à reconnaitre les fautes qui ont été commises. Nous le faisons en partageant les mémoires individuelles, familiales et associatives, en développant le travail de recueil des témoignages, en incitant les témoignages croisés au sein des établissements scolaires. Ainsi, le 60ème anniversaire de l’année 1962 sera celui du dialogue et de l’apaisement entre les différentes mémoires de la guerre d’Algérie. »

* La journée nationale d’hommage aux Morts pour la France pendant la guerre d’Algérie et les combats du Maroc et de la Tunisie a été instaurée par le décret n° 2003-925 du 26 septembre 2003. Elle fait l’objet d’une cérémonie d’hommage à Paris, devant le Mémorial national de la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie. La cérémonie du 5 décembre 2014 était présidée par le secrétaire d’État auprès du ministre de la Défense, chargé des Anciens combattants et de la mémoire, Jean-Marc Todeschini.