La rubrique des « coups de cœur Karine » est une rencontre hebdomadaire sur le site de Lourdes Actu, proposée par la Médiathèque avec Karine Aristin Chargée de la culture.
Cette semaine elle vous propose » QUITTER VENISE » de Anne Révah.
QUITTER VENISE
L’auteur : Anne Révah, né en 1967 à Paris. Écrivain.
L’histoire :
La personne qui narre son histoire a grandi dans une atmosphère étouffante entretenue par les réminiscences de sa grand-mère relativement à l’holocauste subi par les juifs durant la guerre. Dépositaire de cette mémoire de souffrance, le narrateur ne supporte plus ce rôle familial qu’il endure depuis tout enfant, et choisit comme exutoire la pratique du violon, tout d’abord en tant qu’amateur, puis en jouant , par la suite, avec beaucoup de talent.
Plus tard, dans un véritable désir de fuite, c’est dans les œuvres humanitaires à l’étranger, puis dans un long séjour au Brésil que le narrateur se réfugie et se cache du poids trop pesant de son passé, ainsi que celui de ses ascendants, sur lequel il s’est si imparfaitement construit.
Lors d’une de ses missions, on lui découvre, après avoir souffert de douleurs intenses, une maladie chronique : la maladie de Crohn. Ainsi, d’une santé fragile et fréquemment affecté de troubles inhérents à sa pathologie, il est contraint de rentrer en France. C’est à ce moment qu’il se consacre véritablement à sa passion musicale.
Par la suite, grâce à une petite annonce, le narrateur décroche un contrat en tant que professeur de violon, pour l’héritier d’une famille patricienne de Venise : les Gambardelli. Cette nouvelle vie à Venise lui permettra de découvrir la ville, prétexte, au gré de ses déambulations, à un voyage introspectif, ainsi qu’à l’observation quasi entomologique des gens qu’il croise.
Ce sera surtout un couple qui l’intriguera, au hasard de ses promenades, et qu’il finit par rechercher. La jeune femme s’appelle Marianne et flâne au bras d’un homme bien plus âgé qu’elle. Quel serait leur lien ? Sont-ils parents ? Amants ? Peu à peu Marianne exerce une véritable fascination jusqu’à l’obsession sur notre observateur.
Ce qui m’a plu :
Ce livre ne plaira pas au lecteur ne supportant pas l’introspection et les circonvolutions intimistes de la psyché. Le rythme est lent. Quant au style, peut-être sera-t-il analysé comme étant trop plat et linéaire.
Cela dit, au-delà de ces considérations, somme toute, subjectives, nous sommes en présence d’un beau roman. Le texte est bâti sur des pans de vie du narrateur, puis de ceux appartenant aux gens qu’il observe et qu’il côtoie. D’ailleurs, cette activité constante d’observation démontre une distanciation relativement à l’existence. Distanciation que l’on comprend lorsqu’on perçoit la culpabilité qui écrase le narrateur, ainsi que le poids trop lourd du souvenir que sa famille lui a fait porter et qui contribue grandement à sa fragilité et sa détresse intérieure.
Il faut noter aussi la subtile délicatesse avec laquelle est mené le récit. Du reste, soulignons que le texte est écrit à la première personne du singulier, et que rien ne nous permet de savoir à qui nous avons affaire quant à l’identité de l’auteur, et ce jusqu’à la dernière ligne, ce qui confère, au roman, un aspect énigmatique.